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Holga HL-C 60 mm f/8 : un bouchon optique pour reflex Canon

Souvenez-vous de la formidable épopée des Toy-Cameras ? Introduit à la chute du mur par deux étudiants viennois, un appareil jouet venu du froid a provoqué une fascination qui est devenue au fil des années une mouvance internationale : la lomographie.

Souvenez-vous de la formidable épopée des Toy-Cameras ? Introduit à la chute du mur par deux étudiants viennois, un appareil jouet venu du froid a provoqué une fascination qui est devenue au fil des années une mouvance internationale : la lomographie. Mais le fameux appareil 35 mm made in Saint Petersbourg n’est pas le seul représentant de la famille des “Toy Cameras” : il faut aussi compter sur les vénérables Holga et Diana, appareils moyen format made in Hongkong.



Canon 5DMII, Holga HL-C 60 mm f/8, 1/400s à 800 ISO. Posttraitement dans Nik Color Efex Pro 4. En contre-jour, l’objectif produit de nombreux reflets parasites plus ou moins “intéressants”.

Ces appareils ont tout pour séduire les photographes à la recherche d’un rendu qui est diamétralement opposé à ce qu’on obtienne avec un appareil numérique contemporain : vignetage, fuites de lumière, distorsions marquées, flare et manque de contraste. Si le charme des images produites tient en partie à l’utilisation d’émulsions argentiques (les fuites de lumière sont dues à une mauvaise étanchéité du boîtier…), nombreux sont les logiciels, plug-ins et scripts offrant des rendus similaires.



Canon 5DMII, Holga HL-C 60 mm f/8, 1/80s à 800 ISO. Posttraitement dans Nik Color Efex Pro 4 La distorsion en coussinet est très marquée.

Mais il ne faut pas oublier les “Toy-Lenses”, et notamment les créations vendues par Lensbaby, Loreo et SLR Magic. Depuis peu, le célèbre objectif de la Holga 120S est disponible en montures Canon, Nikon et Sony. Commercialisé à moins de 20 euros, il est à peine plus cher qu’un bouchon d’objectif et à ce prix-là on peut se laisser tenter.

Le Holga HL-C 60 mm f/8 est entièrement usiné en plastique, y compris pour l’unique lentille ménisque. Doté d’une baïonnette Canon EF, elle aussi fabriqué en matière plastique, l’objectif propose une bague de mise au point à quatre repères, permettant une mise au point minimale d’environ 1 m. La monture avant est dépourvue de filetage. Si l’ensemble est soigneusement assemblé, on pourrait s’étonner de la présence d’une étiquette “Passed”, faisant allusion à l’existence d’un service contrôle qualité !



On distingue la bague de mise au point, dotée de seulement quatre positions.

La formule optique de l’objectif Holga HL-C 60 mm f/8 est identique à celle de l’appareil argentique Holga 120S. Mais si d’autres testeurs s’étonnent du faible rendement lumineux de l’objectif numérique, ils n’ont pas bien cherché pour élucider le mystère : l’ouverture réelle se situe plutôt à f/30 qu’à f/8, car le fabricant a décidé d’ajouter un “faux ” diaphragme en forme de fleur afin de reproduire le vignetage atypique du Holga 120S. Avec une luminosité aussi réduite, le cadrage et la mise au point deviennent des missions impossibles, même en plein jour. La visée reflex en est très assombrie et l’utilisation de la visée LiveView uniquement envisageable en journée. Souvent, il est nécessaire d’augmenter la sensibilité ISO du boîtier pour ainsi obtenir des vitesses suffisamment rapides lorsqu’on travaille à main levée.



L’ouverture réelle est inférieure de 4 à 5 IL à celle indiquée.

Dans la pratique, la faible ouverture et la focale “mi-poisson, mi-oiseau ” limitent le potentiel créatif de ce caillou en plastique. N’espérez donc pas réaliser des portraits, des photos de rue ou des vues panoramiques de grands espaces : associé à un appareil à capteur grand format, le Holga HL-C 60 mm f/8 équivaut à un objectif à focale standard et lorsqu’il est monté sur un appareil à capteur APS-C, il devient un petit télé (90 ou 96 mm). Bien qu’il soit possible de lui ajouter des accessoires optiques, et notamment des adaptateurs Fish-eye (170 °), grand-angle (30 mm), télé (150 mm) et macro, cela ne modifie pas le T-Stop tristounet de l’objectif.



Canon 5DMII, Holga HL-C 60 mm f/8, 1/13s à 5000 ISO. Posttraitement dans Nik Color Efex Pro 4.


Les photos prises avec cet objectif partagent une déformation forte en coussinet et une perte de piqué en périphérie. Si le rendu général est assez doux, voire mou, la définition de l’optique demeure plutôt honorable au centre de l’image. Quant au vignetage, il est très prononcé avec un boîtier à capteur “full frame” alors qu’il disparaît presque entièrement avec un boîtier à capteur APS-C. Avec son ouverture étriquée, l’objectif produit des images qui ressemblent finalement davantage à celles réalisées avec une vilaine optique sans cachet particulier qu’avec l’infâme cul de bouteille de la Holga argentique. Bref, elles manquent de caractère et il faut souvent leur imposer un posttraitement plutôt musclé pour retrouver un rendu évoquant l’ancêtre.



Canon 5DMII, Holga HL-C 60 mm f/8, 1/250s à 800 ISO. Posttraitement dans Nik Color Efex Pro 4.


Le Holga HL-C 60 mm f/8 fait partie des accessoires dont on se lasse assez rapidement. Certes, le rendu est plutôt amusant, mais l’objectif est bien peu lumineux, sa focale un peu trop longue et son champ d’action (trop) restreint. De plus, pour produire le rendu typique des appareils Holga, il faut souvent investir un peu de temps (et de l’argent) dans le posttraitement. J’ai trouvé les filtres de Nik Color Efex Pro et Topaz Adjust particulièrement efficaces à cette tâche. Le Holga HL-C 60 mm f/8 n’est pas plus onéreux qu’un gros livre de poche et c’est son plus grand atout — à ce prix-là, qui pourra lui résister ?

4 commentaires “Holga HL-C 60 mm f/8 : un bouchon optique pour reflex Canon

  1. Oui, on doit s’en lasser très vite… comme tous ces effets artistiques prêts à l’emploi qu’on trouve dans les logiciels ou les appareils, sous forme de presets, qui ont envahi les galeries d’images, à ce demander si, aujourd’hui, essayer de chercher une belle lumière ou une belle composition intéresse encore quelqu’un…
    Les appareils d’aujourd’hui permettent d’obtenir des clichés d’une précision et d’une qualité stupéfiante, alors pourquoi s’attarder sur des effets Holga, Cyanotype, Selenium ou que sais-je, de plus de manière totalement artificielle ?

  2. Je rejoins Gilles.

    Constructeurs comme nouveaux photographes seraient t’il en manque d’inspiration ? L’avantage de de ceci est que ce n’est pas bien coûteux.

    Il faut croire qu’il est désormais impossible de faire une photo … normale.

  3. Au contraire, cet objectif coute 20€ neuf, pour ceux qui n’on aucun moyen où bien veulent s’amuser pour une série de photos ou vidéos avec comme contrainte tel ou tel objectif pour en tirer le meilleur ( ou voir ce que celui ci va les obliger à faire sur le moment) c’est intéréssant. Je me vois très bien partir sur un festival avec un seul objectif et me faire une série… et pour un autre festival ( ou un voyage…) un autre objectif. Se donner des contraintes pour voir ce qu’on est capable de faire.

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