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Kodachrome : une étoile s’éteint

Annonçant l’abandon définitif de son film Kodachrome pour cette année, la société Eastman Kodak met ainsi fin à une carrière aussi longue que prestigieuse.

Annonçant l’abandon définitif de son film Kodachrome pour cette année, la société Eastman Kodak met ainsi fin à une carrière aussi longue que prestigieuse.

Mis au point par les chercheurs Leopold Godowsky et Leopold Mannes et introduit en 1935 comme pellicule pour le cinéma, ce film inversible couleur fut rapidement adopté par de nombreux photographes, dès la percée du format 35 mm. Au même titre que l’Agfacolor–Neu, film inversible introduit en 1936, le Kodachrome repose sur trois films noir et blanc superposés (un pour chaque couleur), mais les colorants ne font pas partie intégrante des couches, car ils sont ajoutés lors du développement. Il en résulte un grain caractéristique, plus sec, un excellent rendu des détails les plus infimes ainsi qu’une relative insensibilité aux conditions de stockage (chaleur, humidité), avant et après l’exposition de la pellicule. Et comparé aux films de type Ektachrome, le Kodachrome offre une durabilité des teintes exceptionnelle, ce qui le prédestine pour l’archivage.


Photo Eric Meola

Cependant, le procédé de développement (K-14) est très complexe et les laboratoires le maîtrisant se comptaient sur les doigts d’une main : suite à la fermeture des laboratoires à Renens en Suisse en 2006, et à Tokyo en 2007, un seul laboratoire subsiste, situé aux États-Unis.

De plus, Eastman Kodak justifie l’arrêt de production de ce film par une chute des ventes, les photographes se sont majoritairement tournés vers d’autres films (Ektachrome et négatifs couleur) ou vers la prise de vue numérique. De ce fait, le film Kodachrome (qui n’existe plus qu’en 64 ISO) ne représente plus qu’un pour cent des ventes totales des films photographiques de Kodak.


Sharbat Gula, fille afghane, camp de réfugiés à Nasir Bagh près de Peshawar/Pakistan, 1984. Photo Steve McCurry

Kodak présente comme utilisateur emblématique de ce film le photographe célèbre Steve McCurry qui a immortalisé en 1984 une jeune réfugiée afghane sur ce support au rendu si caractéristique, portrait qui lui a valu une couverture du magazine National Geographic. Interrogé au sujet du Kodachrome, Steve déclare :

“Mes débuts ont été marqués par le Kodachrome ; c’est le film que j’ai utilisé pour certaines de mes images les plus célèbres…. s’il est vrai que le film Kodachrome m’a énormément apporté, j’ai depuis quelque temps opté pour d’autres films, ainsi que pour le numérique, pour créer mes images. En fait, lorsque je suis allé reprendre la photo de la “jeune fille afghane” 17 ans plus tard, j’ai utilisé un film professionnel Kodak Ektachrome E100VS plutôt que le Kodachrome de l’originale.”

Kodak estime qu’au rythme actuel des ventes, les stocks de films Kodachrome seront épuisés en début d’automne, pour le traitement, le laboratoire de Dwayne’s Photo continuera jusqu’en 2010. La société recommande d’essayer d’autres films et, notamment, les films professionnels Ektachrome E100G et Ektar 100, doté un grain très fin.

Les derniers rouleaux de cette pellicule rejoignent le musée international de la photographie et du film George Eastman House International Museum of Photography and Film à Rochester. Mc Curry utilisera par ailleurs l’un des tout derniers rouleaux de ce film et les images réalisées iront à l’Eastman House.

Vous trouverez une galerie d’images de Mc Curry, Eric Meola et Peter Guttman ainsi que leurs témoignages sous forme de podcast sur ce site.

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