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La démarche photographique : entre le sujet et l’image

Dans le cadre de notre pratique photographique, notre attention est bien souvent accaparée par la phase technique (le réglage de l’appareil) ou, en tout cas, par l‘étape de réalisation correspondant au déclenchement (réglages et composition). Et pourtant, une photographie se conçoit avant de se réaliser. Mais quelle est donc cette démarche de conception d’image souvent ignorée voire négligée ?

Dans le cadre de notre pratique photographique, notre attention est bien souvent accaparée par la phase technique (le réglage de l’appareil) ou, en tout cas, par l‘étape de réalisation correspondant au déclenchement (réglages et composition). Et pourtant, une photographie se conçoit avant de se réaliser. Elle est pensée avant d‘être prise ou, tout au moins, au moment d‘être prise. Et ce qui se passe dans notre tête – et dans notre cœur –, nous n’en avons, souvent, pas vraiment conscience… Mais quelle est donc cette démarche photographique de conception d’image que nous suivons sans nous en rendre compte, ou que nous négligeons, ce qui nous conduit bien souvent à une déception ?

Afin de mieux comprendre le processus de création photographique, j’ai divisé la démarche en étapes. Celles-ci sont, dans la réalité, plus ou moins distinctes et plus ou moins ordonnées. Bien souvent, elles se chevauchent et interagissent entre elles.

La situation
Tout d’abord, les conditions de prise de vue déterminent quels sujets nous avons à notre disposition mais aussi, bien souvent, notre état d’esprit de prise de vue. En route pour aller au travail, en promenade, en vacances, nous ne réalisons pas les mêmes images ! Nous ne trouvons pas non plus les mêmes sujets.

De plus, les conditions, en particulier lumineuses, constituent, souvent une contrainte technique et déterminent quel type d’image est possible ou non (mouvement figé, pose lente, profondeur de champ réduite ou étendue…).

En pratique, optez pour des réglages “par défaut” adaptés à la situation (mode A ou mode S ? Grande ouverture ou diaphragme fermé ? ISO réduits ou élevés ? Etc.) et commencez à réfléchir à vos envies photographiques : quelle ambiance, quelle lumière, quelle émotion souhaitez-vous retranscrire ?

Le sujet
Vient ensuite l’intérêt pour un sujet. Votre œil est attiré par un élément du décor. Ne laissez pas passer l’inspiration car elle est souvent très fugace et s’exprime parfois sans que nous nous en rendions vraiment compte. Entraînez-vous à écouter cette petite voix dans votre tête qui vous dit “Tiens, le rendu écaillé de cette vieille porte est bien joli” ou “A cette heure, le réverbère projette son ombre sur le mur, c’est intéressant”. Chacun d’entre nous a ses sujets de prédilection mais il est essentiel de développer sa réceptivité pour trouver régulièrement de nouveaux sujets.

En pratique, soyez à l‘écoute pour mieux repérer vers quels sujets votre sensibilité a tendance à vous mener. Rendez cette étape consciente et élargissez votre champ d’action en devenant de plus en plus curieux et réceptif à votre environnement.

Livres conseillés sur ce sujet

5 commentaires “La démarche photographique : entre le sujet et l’image

  1. C’est toujours un plaisir et une expérience très enrichissante que de lire un de tes articles, chère Anne. J’aime beaucoup cette phrase : « N’est-il pas dommage de se contenter, comme on dit, “d’appuyer sur le bouton” quand on peut mettre en image une vision pour partager vraiment ce qui nous tient à cœur ? » C’est tellement vrai ! Il arrive souvent que l’on me dise qu’il suffit juste d’appuyer sur le bouton… J’aime alors à répondre que oui, mais que j’ai mis des années avant de savoir comment et à quel moment appuyer !

  2. Bonjour, afin d’enrichir le sujet et de proposer une approche sociologique, je vous conseille la lecture de l’ouvrage coordonné par P.Bourdieu : Un art moyen, essai sur les usages sociaux de la photographie. P.Bourdieu, L.Boltanski, R.Castel, J.-C.Chamboredon
    Éd. de Minuit, Le sens commun,1965.
    Revue, 1970, 352 pages.
    ISBN : 2707300292

    Alors que tout semble promettre la photographie, activité sans traditions et sans exigences, à l’anarchie de l’improvisation individuelle, rien n’est plus réglé et plus conventionnel que la pratique photographique et les photographies d’amateurs. Les normes qui définissent les occasions et les objets de photographie révèlent la fonction sociale de l’acte et de l’image photographique : éterniser et solenniser les temps forts de la vie collective. Aussi la photographie, rite du culte domestique, par lequel on fabrique des images privées de la vie privée, est-elle une des rares activités qui puisse encore de nos jours enrichir la culture populaire : une esthétique peut s’y exprimer avec ses principes, ses canons et ses lois qui ne sont pas autre chose que l’expression dans le domaine esthétique d’attitudes éthiques.

  3. Je ne suis pas sûr que le texte de Bourdieu soit bien en rapport avec l’article d’AL Jacquart.
    L’extrait du livre de Bourdieu (livre que je n’ai pas lu – et donc je me réfère ici uniquement à l’extrait qui est cité) parle de l’acte photographique « amateur » (c’est lui qui le dit, et j’ai bien compris qu’il n’y a rien de péjoratif), de celui que constitue la photographie « sociale » (les souvenirs que nous engrangeons à titre personnel pour « éterniser et solenniser les temps forts de la vie collective »).
    L’article d’AL Jacquart ne parle pas du tout, à mon avis, de cela. AL Jacquart est une excellente photographe, une ciseleuse d’images, qui possède à la fois une maturité dans son travail et dans sa réflexion théorique sur ce travail. Elle nous fait partager ici une réflexion subtile sur l’art de la composition, à travers sa sensibilité et « son acuité visuelle de photographe ». Il ne s’agit pas de photographie sociale, mais bien de volonté artistique avérée et tangible.
    Elle parle (très peu) de technique, mais (surtout) de perception, d’émotion, d’anticipation, de construction plus ou moins consciente de l’image, de choix esthétiques, d’une vraie réflexion photographique. C’est à la fois extrêmement rare et extrêmement difficile.
    Le seul risque serait d’y perdre une sorte de spontanéité, de jubilation brouillonne mais créative, d’élan irraisonné qui peut nous submerger et nous lancer dans une photo « à l’instinct ». Cet « emballement photographique » peut aussi générer quelques pépites. Mais sans doute faut-il avoir déjà une bonne pratique pour pouvoir « obéir à cet instinct » et en tirer de beaux résultats.

  4. Pingback: Les liens photo - Juin 2012 | sfphotos.fr

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