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La technologie des objectifs

Lentilles en fluorite et verres à faible dispersion

L’aberration chromatique est provoquée par le fait que la lumière passant à travers le verre est d’autant plus réfractée que sa longueur d’onde est plus courte. Ce phénomène est démontré par l’expérience du prisme de Newton, dispersant un faisceau de lumière blanche en spectre coloré. L’aberration chromatique est d’autant plus marquée que l’objectif est de plus longue focale et de plus grande ouverture. Sa correction est historiquement obtenue par l’emploi d’un doublet, c’est-à-dire une lentille convergente en verre Crown peu dispersif (nombre d’Abbe A > 55, indice de réfraction n < 1,6) collée à une lentille divergente en verre Flint très dispersif (A < 50, n > 1,6). Selon cette configuration, la correction n’est assurée que pour deux couleurs primaires, par exemple le bleu et le vert. La fluorite (CaF2), substance minérale cristalline, présente des caractéristiques particulières associant un faible indice de réfraction (n = 1,43) et une très faible dispersion (A = 95,6), particulièrement dans le bleu et le vert. L’emploi d’une lentille en fluorite permet la correction apochromatique, c’est-à-dire étendue à l’ensemble du spectre visible, d’un super-téléobjectif à grande ouverture.

Chez Canon, les super-téléobjectifs de 300 à 600 mm, ainsi que deux zooms à ouverture constante incorporent une lentille en fluorite et une ou deux lentilles asphériques. Les lentilles en fluorite étant onéreuses et fragiles, les opticiens utilisent plus volontiers des verres optiques spéciaux, dont il existe deux grands types. Le nom des objectifs utilisant ces verres spéciaux est complété de sigles divers : Canon UD (Ultra low Dispersion), Minolta/Sony LDO, Tamron LD, Nikon, Olympus, Pentax ED, Sigma SLD, Tokina SD, etc. Ces appellations propriétaires sont des termes de marketing appliqués à des verres semblables, car tous s’approvisionnent en verres spéciaux bruts chez les mêmes 4 ou 5 fabricants verriers mondiaux.

L’autre type de verres spéciaux est les verres à dispersion anomale. En simplifiant, on peut dire que la dispersion est due à ce que la lumière de courte longueur d’onde (le bleu) se propage un peu moins vite dans le milieu transparent que la lumière de plus grande longueur d’onde (le rouge). Ainsi, l’indice de réfraction n du milieu transparent décroît-il quand la longueur d’onde diminue ou, ce qui revient au même, quand la fréquence augmente. C’est pour cela que le bleu est plus dévié vers la base du prisme que le rouge. La dispersion du verre optique est dite normale quand l’étalement du spectre est à peu près proportionnel aux longueurs d’onde. Mais il y a des verres optiques, dont les caractéristiques se rapprochent davantage de celles de la fluorite, avec lesquels la dispersion est normale sur une partie du spectre et anomale sur une autre. C’est le cas, par exemple, si la lumière rouge est relativement plus retardée que la lumière bleue et se rapproche du vert, ce qui concentre le spectre de dispersion, en permettant ainsi une meilleure correction de l’aberration chromatique. Dans quelques- uns de ses objectifs les plus élaborés, Minolta (donc Sony) signale la présence de lentilles en verre à dispersion dite « anomale » (AD = Anomalous Dispersion). Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y en a pas chez les autres !

Mise au point interne, mise au point arrière

Autrefois, la fonction manuelle de mise au point impliquait le déplacement longitudinal de l’ensemble des lentilles de l’objectif. Avec les objectifs AF, au contraire, la mise au point ne mobilise que le déplacement d’un ou plusieurs groupes de lentilles situés devant le diaphragme (mise au point interne ou IF) ou derrière le diaphragme (mise au point arrière ou RF). Dans les deux cas, le fait de ne déplacer qu’une partie des lentilles de moindre diamètre requiert moins d’énergie de motorisation et accélère la mise au point AF. De plus, la lentille antérieure de l’objectif restant fixe, la mise au point ne modifie pas l’orientation d’un filtre polariseur ou dégradé, par exemple.

Mise au point interne (IF). Ce principe permet d’effectuer la mise au point pour toutes les distances en ne déplaçant que deux groupes optiques internes. Avantages : longueur constante de l’objectif, la lentille frontale ne tourne pas (ce qui facilite l’emploi d’un filtre dégradé ou d’un polariseur), mise au point minimale plus courte, plus grande rapidité de l’AF.

Retouche manuelle de la mise au point en mode AF

Sur les reflex actuels, le couple boîtier-objectif assure une mise au point AF rapide et précise, encore plus efficace grâce à la sélection automatique ou manuelle des collimateurs AF. En photo d’action et sportive notamment, il est souvent nécessaire de retoucher à l’ultime moment la mise au point effectuée par l’AF. Au lieu d’avoir à repasser en mode manuel, un grand nombre d’objectifs EF motorisés USM de Canon (ainsi que les objectifs à moteur intégré des autres fabricants) permettent, sans quitter le mode AF, de rectifier le point en agissant directement sur la bague de mise au point de l’objectif. Avec ces objectifs, le système FT-M (Full-Time Manual focusing) permet la mise au point manuelle, soit électroniquement (détection du taux de rotation de la bague et déplacement motorisé du groupe optique de mise au point), soit mécaniquement (découplage du moteur AF).

Préréglage de mise au point

Ce système appelé Focus Preset, disponible sur les super-téléobjectifs et certains télézooms (Canon, Nikon, Minolta, peut-être d’autres), permet de spécifier et de mémoriser une distance de mise au point bien précise, puis de la rappeler instantanément en pressant une touche de l’objectif. Durant un match de foot, par exemple, on règle cette distance sur le but afin de saisir instantanément un tir décisif, sans que cela empêche de suivre les actions se déroulant à diverses distances sur le reste du terrain.

Limiteur de distance de mise au point

Par définition, le débattement de la rampe de mise au point d’un objectif va de la distance minimale à l’infini. Pour détecter le sujet, le système AF doit effectuer un aller-retour sur toute l’étendue des distances. Sur beaucoup d’objectifs de longue focale ou de type macro, avec lesquels la variation de tirage est relativement importante, un limiteur de mise au point AF permet de restreindre volontairement la course à la zone de distance où évolue un sujet mobile, ce qui accélère le fonctionnement de l’autofocus. Sur tel super-télé Nikon de 300 mm, par exemple, on peut régler le limiteur de mise au point AF pour une zone proche ou pour une zone lointaine, l’autre limite étant l’infini ou la distance minimale de mise au point (2,5 m pour cet objectif).

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