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Photographie de concert : l’exposition

La photographie de concert est une discipline photographique particulièrement exigeante. Non seulement, le photographe doit partir à la chasse à l’accréditation pour chacune des performances musicales auxquelles il souhaite assister mais il doit aussi faire face à un certain nombre de  contraintes d’ordre technique et logistique pour réussir ses images. S’assurer que le capteur reçoive suffisamment de lumière est alors une des priorités. Mais il faut aussi veiller à ne pas supprimer des informations utiles, à la fois dans les ombres et les hautes lumières. Cet extrait de l’ouvrage « Photographie de concert-Guide pratique » de J.Dennis Thomas qui vient de paraître aux éditions Eyrolles, braque ses projecteurs sur l’épineuse question de l’exposition, particulièrement sensible dans un milieu qui privilégie des éclairages contrastés.

 

L’exposition

En photographie, l’exposition est la quantité de lumière qui est capturée pendant un cycle d’obturation. Elle dépend de trois éléments, tous étroitement liés : l’ouverture, la vitesse d’obturation et la sensibilité ISO. Même si le système de numérotation de ces trois paramètres est différent, tout changement de l’un se fait par indice de lumination, ou « IL », la plupart des boîtiers permettant de les modifier par incréments de 1/3 IL pour avoir un contrôle plus précis. Lorsque la valeur de l’un de ces paramètres est modifiée, la valeur d’un autre doit être changée proportionnellement pour que l’exposition reste identique.

L’éclairage de concert s’étend normalement sur une plage dynamique extrême, allant des ombres noir foncé aux hautes lumières brûlées, comme sur ce cliché du guitariste Ryan Hahn des Local Natives. Photo prise avec un Nikon D700 équipé d’un objectif Nikon Nikkor 28-70 mm f/2,8D à 50 mm (220 ISO, 1/125 s à f/2,8, mesure Spot à -0,3 IL).

En photographie, le but, quel qu’en soit le domaine, est d’obtenir une exposition correcte, c’est-à-dire que le capteur reçoive la quantité de lumière adéquate afin que l’image enregistrée ne soit ni trop lumineuse, ni trop sombre. Le plus souvent, il s’agit aussi de conserver des détails à la fois dans les hautes lumières et dans les ombres, mais ce n’est normalement pas le cas en photographie de musique live. En effet, les concerts se déroulent généralement dans des lieux sombres mais équipés de projecteurs puissants, la plage dynamique de la scène – autrement dit, l’écart entre les hautes lumières et les noirs les plus sombres d’une image – est donc trop étendue pour pouvoir être enregistrée par  la plupart des capteurs.

Pour ce cliché de James Hetfield de Metallica, j’ai privilégié les détails dans les ombres, car la lumière qui l’éclairait était relativement faible. Vu que la sensibilité ISO était à son maximum, j’ai sélectionné une vitesse d’obturation anormalement lente ; j’ai tout de même réussi à obtenir une photo nette. Gardez toujours un œil sur vos réglages pour les ajuster à la hâte si besoin. Photo prise avec un Nikon D700 équipé d’un objectif Nikon Nikkor 28-70 mm f/2,8D à 50 mm (3 200 ISO, 1/30 s à f/2,8, mesure Spot).

Exemple : Une exposition typique dans un théâtre mal éclairé est de 1/15 s à f/2,8 et à 200 ISO. Si vous décidez de figer un musicien en mouvement avec une vitesse d’obturation de 1/15 s, vos photos seront floues. Elle doit être en réalité d’environ 1/125 s. La différence entre ces deux chiffres étant de 3 IL, pour obtenir une exposition équivalente, vous avez le choix entre ouvrir le diaphragme de 3  IL ou augmenter la sensibilité ISO de cette même valeur. Naturellement, si vous utilisez un objectif f/2,8, vous êtes déjà ouvert au maximum, vous n’avez plus d’autre choix que d’augmenter la sensibilité à 1 600 ISO. Par conséquent, une exposition de 1 600 ISO, 1/125 s à f/2,8 est la même qu’à 200 ISO, 1/15 s à f/2,8.

L’étendue de la plage dynamique détectable par votre boîtier dépend de son convertisseur analogique/numérique, plus fréquemment appelé « convertisseur A/N ». De manière empirique, la profondeur de bits de ce dernier indique l’étendue de la plage dynamique que l’appareil photo peut capter.

Cette photo a été réalisée quelques secondes après la précédente. Le projecteur étant dirigé maintenant sur James Hetfield, j’ai modifié l’exposition pour conserver des détails dans les hautes lumières. Photo prise avec un Nikon D700 équipé d’un objectif Nikon Nikkor 28-70 mm f/2,8D à 40 mm (1 800 ISO, 1/200 s à f/2,8, mesure Spot).

La plupart des boîtiers utilisent des convertisseurs entre 10 et 14 bits, si bien que leur capteur devrait être capable d’enregistrer une différence de 10 à 14 IL en luminosité. Mais, en réalité, la plage tonale obtenue avec un appareil photo basique est seulement de 5 à 9 IL. Comme nous l’avons vu, en concert, cela signifie que, dans la plupart des cas, il n’y a aucun moyen de capturer toute la plage tonale de la scène. C’est donc à vous, le photographe, de décider de ce qui est le plus important pour votre image (les détails dans les ombres ou ceux dans les hautes lumières), et d’ajuster votre exposition en fonction pour enregistrer les uns ou les autres.

Votre image numérique commence par être un signal analogique avant d’être convertie en données d’image.

L’œil humain est un « appareil photo » incroyable qui perçoit une plage dynamique d’environ 24 IL !

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6 commentaires “Photographie de concert : l’exposition

  1. pour moi, entre 1/15s et 1/125s, il n’y a que 3 IL et non 4.
    les bornes et les intervalles…

    suggestion: ça serait bien de retrouver l’accès direct à la page d’un article comme avant.

    cordialement

  2. On parle souvent pour les concerts du manque d’ouverture pour ceux qui n’ont pas la chance d’avoir des objectifs lumineux (bien sûr on oublie le flash), mais la mesure spot est bien souvent méconnu et tout aussi importante si ce n’est plus.

    • Tout à fait, Franck, mais la mesure Spot ne résoudra pas pour autant un éventuel manque de lumière puisqu’il s’agit simplement d’une méthode pour bien exposer 😉

  3. Personnellement, je n’utilise pas la mesure spot. Pour l’expo, je suis en tout manuel et j’ajuste quand il y a besoin. Mais par contre, j’ai pas peu du « bruit » du tout, j’en ai même fait un peu mon image de marque. Du coup, dans les petites salles, je shoot en 6400ISO avec mon 5DmkII.

    Il ne faut pas oublier que la plupart des photographes n’ont pas accès aux grandes scènes, le 1/30s devient plus la règle qu’autre chose. Dans une petite salle, l’éclairage se limite souvent à une demi douzaine de bol LED.

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