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Calibrer un écran ? Normes ISO et autres préconisations

Régler le point blanc

L’ISO recommande que le point blanc, c’est-à-dire la couleur du blanc de l‘écran soit celle de l’illuminant standard D50 (température proximale de couleur de 5000 K). Elle précise cependant qu’une température supérieure, par exemple D65/6500 K, peut être adoptée si l‘écran n’est pas utilisé pour des comparaisons simultanées affichage/papier. Si, en effet, l‘écran est examiné isolément, le dispositif d’examen du papier n‘étant pas dans le champ de vision de l’observateur quand il regarde l‘écran, alors l’ISO fait l’hypothèse que l’observateur est bien “chromatiquement adapté” au blanc de l‘écran, c’est-à-dire qu’il perçoit effectivement comme blanche la couleur du blanc de l‘écran (R=V=B=255) quelle que soit sa couleur… L’ISO ajoute que, pour des niveaux de luminance modérés, des températures proximales de couleur supérieures à D50, comme D55 ou D65, procurent en général des impressions visuelles plus neutres que D50.

La préconisation du blanc D50 est théoriquement cohérente avec le standard appliqué en imprimerie et dans les profils ICC de sortie. Par ailleurs, si vous souhaitez éclairer la version papier avec un illuminant ayant la même température proximale de couleur, il est facile de trouver des sources d‘éclairage approchant ce standard. Pensons par exemple aux lampes Solux (4700 K) commercialisées par Christophe Métairie.

En revanche, prenez garde qu’une telle valeur, même si elle est théoriquement justifiée, est très éloignée de la couleur naturellement produite par la plupart des écrans. L’imposer à votre appareil revient à lui infliger une torture dont il vous punira, d’une part en vous restituant des images que vous trouverez jaunâtres et, d’autre part, en réduisant le gamut. Si vous tenez à fixer le point blanc aux environs du D50/5000 K des profils d’impression, l’illuminant D55/5500 K est, le cas échéant, un compromis plus raisonnable.


Liste des valeurs de point blanc proposées par le logiciel de calibrage Eye-One Match

Pour un écran LCD, sauf s’il s’agit d’un très haut de gamme capable de se conformer à n’importe quel valeur de point blanc, il est en général recommandé, sous peine de dégrader le gamut de l’affichage voire sa capacité en luminance, d’adopter comme cible, le blanc naturellement produit par l‘écran, c’est-à-dire le blanc de son rétro éclairage. Selon le logiciel de calibrage utilisé, l’option à choisir alors pour le point blanc peut s’appeler “Point blanc naturel”, “Natif au moniteur”, “Native white”… Si l‘écran dispose d’un réglage du blanc par déplacement de trois curseurs primaires RVB, alors son réglage sur sa valeur naturelle est obtenu en plaçant les trois curseurs sur 100 %. Votre logiciel de calibrage achèvera la construction de votre profil d’affichage en vous donnant un bilan de calibrage indiquant la couleur réelle du blanc natif de votre écran. Selon les appareils, ce blanc se situera quelque part entre D50/5000 K et D65/6500 K. Ne vous inquiétez pas si cette couleur native est différente de celle de l‘éclairage que vous appliquez à votre image sur papier, car si vous n’observez pas simultanément l‘écran et le papier, votre vision s’adaptera automatiquement au blanc du papier quand vous regarderez le papier et au blanc de l’affichage quand vous observerez l‘écran… Telle est en tout cas l’hypothèse formulée par l’ISO.


Boîte à lumière SpectraLight Jr. capable d‘éclairer une image sur papier avec n’importe lequel des illuminants standardisés : D50, D65, D75… (GretagMacbeth).

Livres conseillés sur ce sujet

22 commentaires “Calibrer un écran ? Normes ISO et autres préconisations

  1. Voilà encore un article du Grand Jean (par opposition à Petit Jean) qui comme à son habitude est clair, concis, précis avec les pointes d’humour qui vont bien.

    C’était un plaisir de livre votre ouvrage (excepté les pages de formules que j’ai allègrement survolées vu que mon niveau n’est pas de seconde mais de bac -3) et ce plaisir est renouvelé à vous lire ici.

    J’aime ce ton pédagogique et aimerais que tout nos professeurs du web en prennent de la graine.

    Bravo et encore merci,

    Valery

    PS: question subsidiaire à 1€: quel serait à l’heure actuelle la sonde la plus honnête et bon marché pour calibrer mes écrans?

  2. Effectivement très bon article, à la fois précis et PRAGMATIQUE!
    J’ai acheté votre livre pour approfondir un peu plus, mais n’ai pas encore eu le temps de m’y plonger 🙂
    On a déjà ici un bon point de départ (en plus j’ai acheté la sonde qui est prise en exemple).
    Je trouve surtout utile de préciser que le choix de la luminosité est importante, mais que l’œil peut s’adapter au niveau de la T° de couleur… dans certaines conditions (éclairage ambiant pas trop fort pour que l’œil ne soit pas influencé, « pièce blanche »…)

  3. Merci pour cet article qui a le mérite de la clarté et de répondre aux questions auxquelles je ne trouvais aucune réponse précise, comme l’utilité et la pertinence du point blanc natif ou de la T° « L ».

    PS. Valery, est-ce toi qui t’occupe de Bibble ? Moi, c’est Gilles d’Utiliser-Lightroom …

  4. Merci pour vos commentaires.

    Venons en à la question à 1 €. Les colorimètres modernes aujourd’hui sur le marché (X-Rite Eye-One Display2 et Datacolor Spyder3) sont de bons instruments de mesure. Je n’aurais pas fait la même réponse naguère, quand Colorvision commercialisait les sondes Spyder1 puis 2, qui étaient des instruments moins précis que leurs concurrents (DTP94 de X-Rite et Eye-One Display 1 puis 2 de GretagMacbeth).

    Entre les colorimètres Eye-On Display2 et Spyder3, les principales différences résident dans les logiciels qui leurs sont associés. Ma préférence va vers Eye-One Match car il fonctionne aussi avec le spectrophotomètre Eye-One Pro, ce qui permet une migration sans douleur quand on décide d’investir dans un tel instrument pour calibrer une imprimant ou un APN…

    Le colorimètre le plus précis est sans doute le défunt X-Rite/Monaco DTP94 mais il ne permet pas la mesure de l’éclairage ambiant et n’est plus disponible en France. Il peut cependant être acheté sur le site d’Integrated Color Corp en « bundle » avec le logiciel (excellent mais sans version français) ColorEyes Display Pro.

  5. Oui (si Volker dit maître à M. Delmas, alors que dois-je dire, je suis baba?)

    Monsieur l’écrivain de talent (ça doit plaire ça),

    Vraiment merci pour la réponse à la question à 1€. Je sais ce qu’il me reste à acheter maintenant pour ensuite peaufiner mon GNU/Linux/Ubuntu 64 bits (ouf).

    Merci,

    Valery

  6. Je calibre mes écrans depuis longtemps (très longtemps…)
    Mais cette mise au point claire, compréhensible, et agréable a lire fait du bien et rappel quelques notions particulièrement utile.
    Bravo et merci.

  7. Kagou, excusez ma réponse tardive mais je voulais vérifier auprès des spécialistes X-Rite qu’il n’y avait pas de fait nouveau ou prévisible à court terme susceptible de modifier ma réponse…

    Le ColorMunki est un excellent instrument de mesure, dont la rumeur assure qu’il est basé sur le même dispositif de capture que celui qui est incorporé dans la gamme Eye-One Pro, vaisseau amiral de la maison X-Rite/GretagMacbeth.

    Mais X-Rite présente le ColorMunki comme une combinaison instrument-logiciel destinée aux photographes ou graphistes qui ne souhaitent PAS plonger dans les finesses du vocabulaire colorimétrique (coefficient gamma, valeur de luminance maximale…) Le logiciel du ColorMunki ne permet donc PAS de fixer d’objectifs pour le gamma ou la luminance du blanc.

    Pour le gamma, il adopte la valeur 2,2 ce qui est bien. Pour la luminance, il propose une fonction d’optimisation, dont X-Rite dit qu’elle est basée sur les niveaux qui sont déjà suggérés par le logiciel Eye-One Match 3. Pour un écran LCD, la version précédente de ce logiciel suggérait 140 cd/m2 ce qui était bien trop élevé. La version actuelle préconise 120 cd/m2 ce qui reste élevé tout en étant plus raisonnable.

    Une anecdote pour conclure. Lors d’une présentation du ColorMunki organisée par un grand distributeur international à l’occasion du lancement du système, le patron du distributeur définit son marché cible en me répondant en substance « si vous me parlez de DeltaE, de gamma ou de luminance, le ColorMunki n’est pas pour vous. Il vaut mieux que vous achetiez un système de la gamme Eye-One ». Je vous ferai une réponse analogue : si vous souhaitez régler votre écran sur une valeur spécifique de luminance maximale, par exemple 90 cd/m2, achetez plutôt un Eye-One Display2 qu’un ColorMunki…

  8. Merci pour cette réponse des plus instructive.

    Je regrette néanmoins que ce soit (encore une fois) le logiciel qui limite le matériel, dans notre cas la sonde. Car on pourrait imaginer que le projet Argyllcms supporte le ColorMunki et dès lors il serait possible de définir la luminance voulue avec cette sonde et peut être révéler son potentiel comparé aux autres sondes.

  9. Kagou, vous avez parfaitement raison, l’instrument de mesure ColorMunki pourrait être piloté par un tout autre logiciel que celui qui l’accompagne. Il pourrait par exemple être géré par le logiciel X-Rite Eye-One Match fourni avec les instruments de la gamme Eye-One, qu’il s’agisse du colorimètre Eye-One Display2 ou du spectrophotomètre Eye-One Pro… Mais il ne semble pas, pour l’instant, qu’une telle polyvalence soit envisagée par le marketing X-Rite…

    Argyllcms fonctionne aujourd’hui avec « tous » les instruments GretagMacbeth/X-Rite, y compris des modèles anciens disparus des catalogues depuis plusieurs années, mais il n’est pas encore compatible avec le ColorMunki…

  10. En ce moment on parles de plus en plus d’écrans wide gamut et c’est ce que les industriels vont nous vendre après avoir tous achetés des 22 ou 24 pouces LCD. Je me demandais si ce type de sondes seront encore fonctionnelles ou bien vendront-ils des sondes wide gamut. Ma logique voudrait que ces sondes soient polyvalentes, mais j’ai comme un affreux doute.

  11. Valery Landon, vous avez théoriquement raison. L’augmentation des gamuts des écrans pour arts graphiques pourrait poser un jour un problème à certains colorimètres dont les capacités sont limitées. Mais aujourd’hui, les sondes X-Rite DTP94 (alias Monaco OPTIX XR) et X-Rite/Gretag Color-Eyes Display2 savent parfaitement calibrer les écrans à large gamut commercialisés par Eizo/LaCie/NEC. Certains de ces écrans sont d’ailleurs commercialisés en bundle avec un Color-Eyes Display2. Il reste que certains colorimètres relativement récents comme le Datacolor/ColorVision Spyder2 rencontrent déjà des difficultés avec de tels écrans…

    Il faut noter que que si on emploie un spectophotomètre au lieu d’un colorimètre (par exemple un Eye-One Pro ou un ColorMunki), ce risque n’existe pas. En effet, ces instruments ne cherchent pas à simuler la perception visuelle par des capteurs munis de filtres colorés dont les capacités sont limitées, il mesurent les spectres, ce qui est une mesure physique « absolue » et ils en déduisent par calcul les « composantes trichromatiques » XYZ/Lab de la couleur perçue en se basant sur les fonctions colorimétriques CIE qui modélisent la vision humaine des couleurs.

  12. M. Delmas, je vous remercie pour cette réponse on ne peut plus claire (une habitude chez vous). Et merci aux éditions Eyrolles (Stéphanie Poisson entre autre) de nous permettre d’être en contact avec nos auteurs favoris 🙂

  13. M. Delmas : savez vous si la fréquence d’affichage influence le calibrage et caractérisation d’un même écran et s’il faut donc refaire un nouveau profil ? Étant sous Linux, si je ne fais rien mon écran (BELINEA 101910) tourne à 60Hz, mais si je décide de passer avec les pilotes propriétaires (nvidia) j’ai la possibilité de passer à 75Hz. Donc 1/ la fréquence joue-t-elle sur le rendu de l’écran et 2/le changement de pilote (libre->proprio) ou plus généralement une mise à jour du pilote installé nécessite-t-il de refaire un nouveau profil ?

  14. Kagou : comme vous le savez, l’établissement d’un profil d’affichage doit être effectué après que l’écran ait été « réglé », c’est-à-dire que les paramètres de « réglage » de l’écran lui-même (avec ses boutons ou son menu OSD) mais aussi ceux de la carte graphique (avec son logiciel pilote associé) aient été fixés.

    Donc, si on met à jour le logiciel associé à la carte graphique sans changer ses paramètres, il n’est pas utile de reconstruire le profil. En revanche, si on modifie l’un des paramètres de réglage de l’écran, par exemple la fréquence de rafraîchissement, il faut théoriquement refaire le profil. Ceci posé, même si la commutation des canons à électrons ou celle des cristaux liquides sont des phénomènes non instantanés qui pourraient avoir une influence sur le comportement colorimétrique de l’affichage, en pratique, au moins avec des fréquences courantes, je n’ai jamais décelé de modification significative de la colorimétrie d’un affichage consécutive à changement de fréquence.

    En revanche, on peut imaginer que le colorimètre utilisé pour le calibrage ait un comportement plus ou moins correct selon la fréquence (car il ne faut pas faire le mesure quand les canons à électrons sont éteints…). Ces instruments de mesure sont conçus pour en tenir compte. Dans le cas, par exemple, du Eye-One Display2, un capteur spécial est consacré exclusivement à la détection de la fréquence.

  15. Bonjour Jean,

    Curieux que ce problème ne soit pas traité, je l’expose ici:
    – Comment venir à bout de la luminance excessive d’un iMAC 24 ?

    Oui, il existe des softs mais il influencent obligatoirement sur la calibration… Je précise que j’ai Coloreyes PRO.

    Apple se targue d’être accès Photographe et Graphistes, mais avec un tel écran, c’est dans les centres de bronzage qu’ils devraient présenter leur produit.

    Calibré en D50, la luminosité est moins fatigante, mais ce n’est pas la panacée.

    Une idée sur le sujet ? Un second écran est indispensable ?

  16. Désolé de découvrir votre question si tardivement.

    D’une manière générale, les écrans des systèmes « tout en un » intégrant un écran, en particulier les portables, sont dotés de systèmes d’affichage difficile voire impossibles à étalonner correctement.

    Je n’ai pas une grande expérience des écrans Apple, mais ils n’ont pas la réputation d’être bien adaptés aux arts graphiques. Comme ses concurrents les plus prestigieux (LaCie, Eizo…) Apple a pris en outre la mauvaise habitude de régler en usine ses affichages sur une « luminosité » bien trop élevée. Dans le cas de certains écrans Apple, je sais par ailleurs qu’il est parfois difficile, voire impossible, de les régler sur une luminance du blanc adaptée aux photographes, c’est à dire 90-100 cd/m^2.

    Nombreux, très nombreux, sont les photographes qui connectent un écran Eizo, LaCie… à leur Mac…

  17. Bonsoir Monsieur,

    Je me permets de remonter ce fil car le point suivant est très rarement évoqué, et la question demeure ;

    Si un écran possède un point blanc natif à 6500°K, n’est-ce pas contre-productif que de vouloir l’amener coûte que coûte à 5000, voire 5500°K lors de la caractérisation ? (tout le monde n’a pas un écran à 2000 € !)

    N’est-il pas préférable de choisir un espace de travail en rapport avec le point blanc natif de son écran, afin de favoriser le maximum de précision des couleurs à l’écran, quitte à « rogner » la précision écran/papier ?

    En vous remerciant.

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